La viande du futur

L’industrie de la viande se trouve face à un tournant – les revendications sociétales pour davantage de durabilité et de bien-être animal ainsi que les progrès technologiques ouvrent la porte à un avenir dans lequel la viande se développera bientôt en dehors des étables.

Dans la Stratégie pour le développement durable 2030 érigée par le Conseil fédéral et adoptée en juin 2021, la consommation durable figure parmi les priorités. Un des sous-objectifs est la transformation des systèmes alimentaires.

​​La (non-)consommation de viande polarise les débats mais c’est un sujet incontournable lorsque l’on traite du système alimentaire dans un contexte de durabilité. C’est précisément pour cette raison qu’une analyse factuelle de cette thématique est primordiale.

C’est un fait incontestable : notre consommation de viande est bien trop élevée. Avec près de 50 kg par personne et par an, les Suisses·ses consomment deux fois plus de viande que ce qui est recommandé par l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires. Les conséquences ne portent pas uniquement sur notre santé : en Suisse, la consommation de produits d’origine animale est responsable de plus de 30 % de l’impact environnemental.

Alors que faire ? Les steaks végétariens sont-ils une solution ? Depuis quelque temps, le marché des alternatives végétales à la viande ne cesse de croître dans notre pays. Des start-up comme « Planted » ou l’assortiment « V-Love » de la Migros attirent de nombreux·ses consommateurs·ices vers les produits alternatifs à la viande à base de plantes et sont la preuve qu’être flexitarien·ne ou végétarien·ne ne signifie pas renoncer définitivement au goût de la viande.

Pour de nombreux·ses expert·e·s, ce que l’on appelle la « viande propre » représente une chance encore plus grande pour un changement durable de l’industrie de la viande. Contrairement à la méthode conventionnelle de production de viande – qui consiste à élever, nourrir et abattre des animaux vivants – la production de viande cultivée utilise un échantillon de cellules pour faire croître des tissus dans un environnement contrôlé grâce à des méthodes biotechnologiques qui sont également utilisées dans la recherche médicale et/ou les transplantations d’organes.

Le résultat : de la viande qui, comparée à son équivalent issu de la production conventionnelle, nécessite 99 % de terres en moins, consomme jusqu’à 96 % d’eau en moins et produit jusqu’à 96 % d’émissions de gaz à effet de serre en moins. Mais ce n’est pas tout, le plus grand avantage de la viande cultivée est d’ordre éthique. En effet, aucun animal ne doit être tué pendant la production. En fonction de la méthode et du type de cellules utilisées, une seule « cellule mère » pourrait théoriquement répondre à la demande mondiale annuelle de produits carnés. C’est une réorientation de 180° par rapport à l’élevage intensif, qui continue à se développer également dans notre pays et pour lequel plus de 70 millions d’animaux de rente sont abattus chaque année en Suisse.

Diverses études montrent que la viande cultivée dépasse la viande conventionnelle également dans d’autres domaines. Comme elle est produite dans un environnement stérile et strictement contrôlé, elle est bien plus sûre pour nous, les humains, que la production conventionnelle – le risque d’infections zoonotiques est entièrement évité et il n’y a pas d’antibiotiques dans le produit final.

Trop beau pour être vrai ?

Il reste toutefois quelques obstacles à surmonter concernant sa compétitivité – notamment son prix. L’année dernière, l’entreprise suisse Mirai Foods a annoncé vouloir concurrencer les prix actuels de la viande d’ici cinq ans. Actuellement, un kilo de « viande propre » coûte autant qu’une petite voiture. Les choses sont un peu plus avancées à Singapour. Dans un restaurant, on peut déjà commander des nuggets de poulet à base de viande cultivée fabriqués par la start-up technologique américaine « Eat Just ».

Que signifie cette évolution pour la Suisse ? En tant que pays riche, nous avons la possibilité de jouer un rôle de pionnier à l’internationale dans le domaine de la production de viande technologique et durable. Le passage à la viande cultivée permet non seulement d’économiser nos ressources, mais aussi de protéger le climat et promouvoir le bien-être des animaux – ce qui devrait être fortement encouragé. C’est donc à la politique de créer des conditions attrayantes. Parallèlement, nous devons créer une prise de conscience publique sur les avantages de la viande cultivée – avec un dialogue transparent et en impliquant l’agriculture, le commerce de détail ainsi que les consommateurs·ices. Pour un mode d’alimentation qui soit non seulement soutenu par l’ensemble de la société, mais qui nous permette également d’œuvrer ensemble pour un avenir meilleur pour l’environnement, les animaux et nous-mêmes.

Cet article est la traduction d’un article paru en allemand le 15 mars 2021.

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